Le projet éolien flottant en Méditerranée pourrait-il finalement ne pas voir le jour ?

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  • Les supports des éoliennes ont été récemment livrés : des tubes de 220 tonnes qui prendront place sur les flotteurs de 3 200 tonnes.
    Les supports des éoliennes ont été récemment livrés : des tubes de 220 tonnes qui prendront place sur les flotteurs de 3 200 tonnes. Independant - CHRISTOPHE BARREAU
Publié le , mis à jour
Joël Ruiz

Et si le plus gros chantier de France, sur le quai lourd du port de La Nouvelle, n’arrivait pas à son terme ? Les dirigeants de la société Qair qui portent le projet Eolmed d’éoliennes flottantes en mer n’excluent pas cette possibilité à moyen voire à court terme. Ce sont 600 emplois qui sont menacés et quelque 6 000 tonnes de matériel pourraient être abandonnées. À moins que Bercy ne réagisse enfin.

Les projets pilotes d’éoliennes flottantes en Méditerranée pourraient bientôt avoir du plomb dans les pales. Les dirigeants de Qair expriment de très vives inquiétudes quant à l’aboutissement du projet qui a subi la crise sanitaire, la guerre en Ukraine qui a fait passer le prix de la tonne d’acier de 700 à 2 280 € par exemple, l’inflation, les remaniements ministériels… "On se demande pourquoi pour nous (les trois opérateurs de projets pilotes en Méditerranée, NDLR), tout cela n’a pas existé", s’interroge Laurent Vergnet, directeur offshore France, visant directement le ministère des finances. Le fait est que les projets ont pris un an de retard. Pour Eolmed, chaque mois qui passe coûte 1,50 millions d'€. Et la mise à l’eau des éoliennes, en l’état actuel des choses, n’est envisageable que fin 2025. Si le projet se poursuit, bien sûr.

Jean-Marc Bouchet, PDG de Qair, et Laurent Vergnet, directeur offshore France, s’alarment.
Jean-Marc Bouchet, PDG de Qair, et Laurent Vergnet, directeur offshore France, s’alarment. Independant - CHRISTOPHE BARREAU

"Nous avons été oubliés, et nous ne comprenons pas"

Toutes les filières de l’énergie ont bénéficié d’un coup de pouce de l’État et surtout d’une indexation. Sauf eux. Jean-Marc Bouchet, fondateur de Qair qui porte le projet Eolmed depuis 20 ans et concrètement depuis 2016, quand l’Ademe a attribué le projet, dit "ne pas comprendre la posture de l’État qui fait la sourde oreille". "On nous balade, de réunions en réunions, de ministères en ministères et rien ne bouge. Personne n’est fichu de prendre une mesure qui, en plus, ne coûterait rien au contribuable", s’indigne-t-il. Quant aux courriers, notamment du syndicat des énergies renouvelables, ils restent lettre morte.

A lire aussi : Éoliennes flottantes : près d'un tiers du golfe du Lion sera impacté à l'horizon 2050

Plus de 100 M€ de plus sur la facture

À l’origine du projet, il était estimé à 212 millions d’euros. Sauf qu’à la signature en 2022, la facture avait grimpé à 317 millions d'€. Quant aux banques, quand le seuil des 323 millions d'€ sera atteint, elles fermeront le robinet. Qair est parvenu depuis le début à financer, sans recours. Et surtout n’a pas dérogé à la volonté initiale de créer "les bases d’une filière française". Tout a été mis en œuvre pour que ce soit le cas, avec un large recours à des entreprises régionales. En outre, Jean-Marc Bouchet, Laurent Vergnet et le directeur d’Eolmed, Olivier Guiraud, rappellent que pour que le port de Port-La Nouvelle devienne un "port vert" unique en Europe, ce sont plus d’1,2 milliard d'€ investis en 10 ans, par la Région et les entreprises. "C’est toute une stratégie qui est ébranlée", regrettent-ils.

"On est bon pour rater les opportunités"

Lorsque les accords ont été passés avec Bercy à l’origine du projet, le financement devait être de 240 € le MW/h d’électricité qui devait être revendue à 40 € le MW. Sauf qu’au prix actuel, le prix de revente est de 80 à 90 € l’unité. Donc, ceci constitue un manque à gagner de 40 à 50 € par MW/h pour l’opérateur. Lequel demande tout simplement de revenir aux termes de l’accord initial. Sans cela, les fournisseurs ne fourniront plus et c’est tout un écosystème qui sera impacté et 600 emplois menacés. Jean-Marc Bouchet rappelle par ailleurs que Qair "a répondu à des appels d’offres pour des parcs en Espagne et au Portugal, en s’appuyant sur les structures nouvelloises". "On est bon pour rater les opportunités…", regrette-t-il.

Le montage des flotteurs, un jeu de construction de 296 pièces, est en cours. Arrivera-t-il à son terme ?
Le montage des flotteurs, un jeu de construction de 296 pièces, est en cours. Arrivera-t-il à son terme ? Independant - CHRISTOPHE BARREAU

A lire aussi : Où et comment seront raccordées les éoliennes flottantes au large de la Narbonnaise ?

Le compte à rebours est lancé

Le compte à rebours est lancé. Olivier Guiraud estime qu’il est difficile de se projeter à plus de trois mois, et que dès juin, des fournisseurs pourraient abandonner la partie. En outre, les trois turbines et éoliennes seront livrées le 1er août prochain. "Il y a urgence à sauver ce projet important, délibérément 100 % français", insiste Laurent Vergnet.

Le 13 mai prochain, une rencontre est prévue avec le ministre délégué à l’Industrie et à l’Énergie, Roland Lescure, et ses conseillers. Elle sera cruciale, décisive, sauf si le patron de Bercy, Bruno Le Maire, ne consent aucun effort.

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Les commentaires (16)
Bande de Palatrecous Il y a 13 jours Le 03/05/2024 à 18:33

Tout est fait dans ce pays pour saborder les énergies propres et renouvelables. Et après ce gouvernement nous fait de beaux discours sur la transition écologique. Foutaise.

carignan Il y a 13 jours Le 03/05/2024 à 18:22

Une augmentation de capital avec la REGION LE GRAND NARBONNE et TOTAL ENERGIE permettrait de renflouer l'entreprise. Une autre solution que JM BOUCHET vende ses parts à TOTAL ENERGIE NOUVELLE comme il la fait pour QUADRAN.

Gaga11 Il y a 13 jours Le 03/05/2024 à 15:42

donc cette société veut faire de gros bénéfices (sous prétexte d'écologie) tout en faisant financer ses infrastructures , les recherches et travaux préliminaires etc. par le contribuable
C'est une gabegie totale , en énergie renouvelable il y a le soleil :
et là on peut en mettre sur tous les bâtiments commerciaux et industriels (parkings compris) , sur tous les bâtiments publics ,et pourquoi pas au dessus des autoroutes
et l'autre énergie renouvelable est le nucléaire
et il faut que tout cela soit géré par l'état et non par des chasseurs de primes