Assises de Perpignan – Jugé pour le meurtre de sa compagne par incendie : "C’était un avertissement. Pour lui donner une leçon"

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  • Le drame s’est déroulé avenue du Tech dans la nuit du 20 au 21 mars 2021 à Perpignan.
    Le drame s’est déroulé avenue du Tech dans la nuit du 20 au 21 mars 2021 à Perpignan. Nicolas Parent - L'Indépendant
Publié le
Laure Moysset

La cour d’assises des Pyrénées-Orientales a rendu son verdict ce mercredi 24 avril 2024 à l’encontre de Joseph Sergent, jugé pour avoir tué sa compagne en incendiant leur appartement du quartier du Moulin-à-Vent à Perpignan en mars 2021. S’il a été acquitté des faits de meurtre, le quinquagénaire a été condamné pour violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner à 18 ans de réclusion criminelle assortis d’une période de sûreté de 10 ans. Soit 12 ans de moins que la peine requise.

Il paraît plutôt sincère Joseph Sergent. Au-delà du contexte terrible de misère éthylique du drame et de l’impassibilité qui lui colle à la peau comme une marque de fabrique. Incapable même d’un semblant de tristesse pour sa compagne, devenue sa victime. Celle qu’il appelle aujourd’hui "Madame". "Je n’arrive pas à pleurer" lâche cet homme aux cheveux blancs dégarnis, en blouson sur une chemise noire impeccable, qui jette des regards un brin interloqués derrière ses fines lunettes. Et ne se défend presque pas lorsqu’il raconte cette soirée tragique du 20 mars 2021.

Vers 19 heures, avec sa compagne, ils reviennent du Perthus où ils ont acheté leur litre et demi de whisky et ils rentrent à l’appartement du Moulin-à-Vent. Ils entament la bouteille dans un face-à-face tristement ordinaire. "J’ai bu une dizaine de verres, elle aussi. J’étais plutôt énervé. Elle aussi". Alors à 22 heures, comme à chaque fois, c’est la dispute. "Le motif, c’est que l’on n’avait plus de rapport sexuel depuis un moment, on faisait chambre à part, et elle disait que j’étais un moins que rien".

Pascale, comme à chaque fois, appelle une amie qui parvient à calmer les esprits à l’autre bout du fil. Une brève trêve. "À 23 heures, c’est reparti les disputes", amorce l’accusé. "Elle était dans la chambre, moi dans le salon. Ce qui m’a fait déclencher, c’est qu’elle a insulté ma sœur alors qu’elle ne la connaissait pas". Joseph Sergent se saisit d’un chiffon graisseux, l’enflamme avec un briquet et le jette au sol près du canapé. "Madame s’est levée quand elle a vu des fumées, elle est tombée, elle s’est relevée, elle criait : pourquoi tu mets le feu ?'. Je lui ai dit : 'parce que tu veux me mettre dehors avec les meubles et que je ne peux pas partir avec les affaires alors je les brûle'. Elle m’a dit : 'tu dégages'. Je suis sorti sans chaussures avec le chien, elle m’a foutu dehors de chez elle, je suis parti et voilà…"

"En partant, je me suis retourné et je me suis dit eh bien non, je m’en fous"


Joseph Sergent sort de l’immeuble sous les yeux des voisins "comme un passant" et s’éloigne. Tandis que le logement s’embrase et que sa compagne Pascale tente en vain d’échapper à cette fournaise infernale atteignant selon l’expert jusqu’à 800 °C. "Oui, en partant, je me suis retourné deux fois", avoue-t-il. "La première fois, j’ai vu la fumée qui sortait. La deuxième fois, je me suis dit 'eh bien non, je m’en fous'". Le quinquagénaire trouve un coin dans le secteur pour dormir et revient quelques heures plus tard. "Je ne croyais pas à l’ampleur des dégâts que j’avais causé. Je réalise maintenant qu’elle est décédée. C’est vrai, c’est moi. Mais je ne voulais pas lui donner la mort. C’était un avertissement. Pour lui donner une leçon".

Avait-il l’intention de la tuer ? Oui, soutien l’avocat général Jean-Claude Miquel. "Il s’agit purement et simplement d’un meurtre, d’une rage froide. Joseph Sergent sait ce qu’il fait. Il quitte les lieux, en laissant Madame à son sort, pour sauver sa peau. Sans chercher à l’aider", résume-t-il, requérant 30 ans de réclusion assortis d’une période de sûreté de 15 ans. Tout aussi convaincu que les avocats des parties civiles Mes Charles Saliès et Philippe Capsié, dénonçant "un crime d’une immense lâcheté". "Il met le feu pour tout détruire, parce qu’il est humilié, que c’est la rupture définitive, qu’elle lui demande de quitter les lieux et parce que la frustration sexuelle alimente sa colère", plaident-ils. "Il savait que sans lui, sa compagne ne pourrait pas descendre les escaliers de cet immeuble".

Alors, les avocats de Joseph Sergent, Mes Héloïse Dulieu et Gérald Brivet-Galaup déroulent les arguments de contre-attaque. Pour eux, l’intention de tuer doit être démontrée, au moment même des faits. "Ce qui n’est pas le cas". De plus, Joseph Sergent a agi fenêtre ouverte, "au vu de tout le monde". "La victime, qui ne porte aucune trace de violences, a fermé le verrou de la porte derrière lui" et "quand il est parti le feu n’était pas hors de contrôle". "Cet homme n’a pas mesuré les conséquences de son acte. Un acte trop grand pour lui", concluent-ils. Emportant la conviction des jurés. Pas de meurtre. Mais des violences aggravées ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Joseph Sergent ne bouge pas d’un cil…

Condamné à trois ans ferme pour les dégâts matériels liés à l’incendie

Dans cette affaire, Joseph Sergent a aussi été jugé devant le tribunal correctionnel de Perpignan le 21 mars pour "dégradation du bien d’autrui par moyen dangereux pour les personnes", notamment pour les importants dégâts matériels causés par le sinistre dans l’immeuble. Aucun des voisins qui avaient dû être évacués par les pompiers, et dont certains avaient été intoxiqués par les fumées, ne s’est constitué partie civile. Seul le syndicat de copropriété Foncia l’a fait mais n’a déposé aucune demande. Les assurances ayant sans doute assuré les indemnisations.

Le prévenu a finalement été condamné à trois ans de prison ferme et à une interdiction de port d’arme pendant 5 ans.

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