"Insultes, coups, harcèlement" : l'alerte des infirmiers sur les violences qu'ils subissent, "une dizaine de faits signalés tous les mois" dans l'Aude et les Pyrénées-Orientales
Élu le 17 novembre 2023 à la tête du Conseil interdépartemental de l'Ordre infirmier de l'Aude et des Pyrénées-Orientales, Valentin Bisiaux, 31 ans, prend ses marques dans un poste qu'il inaugure, mais au sein d'une structure qu'il connaît bien. Ancien vice-président de l'Aveyron, il est déjà élu au Conseil de l'Ordre d'Occitanie depuis 3 ans. Originaire du Nord, il est installé dans les Pyrénées-Orientales depuis un an et exerce comme infirmier psychiatrique au sein du centre hospitalier de Thuir. À peine arrivé, un dossier lui brûle les doigts : les violences dont la profession est victime. Les actes sont multiples, de plus en plus nombreux, et se manifestent surtout, malheureusement, en pays catalan.
Valentin Bisiaux, vous avez visiblement, en neuf années d'exercice du métier d'infirmier, connu pas mal de régions et de services différents. Autant de pratiques diverses, peut-on supposer. Quel est votre sentiment par rapport aux Pyrénées-Orientales ? Une spécificité ?
Personnellement, j'ai été confronté à quelque chose de nouveau pour moi : l'extrême diversité des cultures et donc des approches que l'on doit avoir à l'égard de la population. Chaque "groupe" a sa propre culture à laquelle il faut s'adapter. Cela a été une découverte et c'est très enrichissant.
A lire aussi : Des infirmiers aptes à signer certains certificats de décès : une expérimentation qui démarre en Occitanie
À quoi va ressembler l'année 2024 pour les infirmiers du département selon vous ? Quels seront les chantiers de l'Ordre ?
Nous aurons une priorité, elle part de la volonté du Conseil de l'Ordre : c'est d'accompagner au mieux les victimes de violences, d'agressivité, d'incivilités de toutes sortes. En France aujourd'hui, deux infirmiers sur trois ont déjà été victimes d'actes de violence. Nous avons noté une réelle poussée des actes de violence et des agressions, verbales ou physiques. Ma volonté, c'est de leur fournir un accompagnement complet.
A lire aussi : Perpignan - "Il ne faut pas laisser passer ça" : agressé en marge de sa tournée de soins, un infirmier dénonce
Nous sommes en train de créer un partenariat avec France Victime
Et cela commence par la remontée d'informations...
Oui, la question, c'est comment un infirmier peut rapporter les faits ? Par la plateforme de signalement accessible sur le site de l'Ordre depuis un an. Ils remontent directement au président du département. J'ai des référents Violences, au sein de la Commission Violences du Conseil. Nous lisons et je rappelle chaque personne. Cela peut ne pas aller plus loin si elle ne le désire pas. Parfois, les victimes veulent juste "signaler un fait" et en rester là. Mais sinon, nous proposons une écoute, un accompagnement, au besoin un soutien psy. Nous sommes en train de créer un partenariat avec France Victime. L'association pourra proposer une vraie prise en charge, y compris administrative et juridique. L'infirmier pourra être accompagné dans son dépôt de plainte. Plainte à laquelle le Conseil de l'Ordre peut s'associer et se constituer partie civile bien sûr. Afin de communiquer et débattre pour avancer sur ce sujet, nous organiserons en 2024 une journée thématique où tous les infirmiers seront invités. Cela devrait se passer au second semestre.
Qu'ont donné les retours de cette plateforme de recueil des signalements au bout d'un an ?
Les observations tirées de cette plateforme, c'est que nous avons en moyenne une dizaine de faits signalés tous les mois.
Pour l'Aude et les Pyrénées-Orientales ?
Oui, mais plus souvent dans les Pyrénées-Orientales. Nous avons fait remonter cela pour alerter le ministère.
Quel genre de violences sont signalées ?
Des insultes au domicile des patients, dans la rue, pour de simples problèmes de stationnement, mais aussi des coups, du harcèlement, au téléphone ou physique... Des violences verbales, physiques, sexuelles (moins souvent quand même) et des attaques sur les biens. Les causes en sont diverses : il peut s'agir de reproches liés à la prise en charge, de patients souffrant de troubles cognitifs, ou encore d'états d'ébriété, ou sous l'emprise de stupéfiants, et enfin, des reproches sur les délais d'attente. Pour nous, c'est LE gros dossier de 2024.
J'ai déjà un compte
Je me connecteVous souhaitez suivre ce fil de discussion ?
Suivre ce filSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?